Comment va le monde aujourd’hui ?

La taxation américaine de l’acier et de l’aluminium doit prendre effet le 1er mai prochain au terme de sa période de suspension. Ce qui laisse très peu de temps pour négocier à Emmanuel Macron – à qui le grand jeu est réservé à Washington au début de la semaine prochaine par Donald Trump, à titre de réciprocité – et à Angela Merkel qui va lui succéder. La Chancelière a comme mission supplémentaire d’obtenir l’arrêt des mesures visant la Russie, qui est aussi sous le feu du président américain, afin d’y protéger les exportations allemandes.

Cecilia Malmström, la commissaire au commerce, a d’entrée de jeu déclaré que l’Union européenne ne négocie pas sous la contrainte et que les États-Unis doivent inconditionnellement annuler toute mesure de taxation. C’est un préalable à la négociation portant sur l’évolution des relations commerciales qu’elle propose. Mais à condition que celles-ci s’inscrivent dans le cadre réglementaire de l’OMC.

En cherchant avec ses méthodes brutales à réduire la balance commerciale très déficitaire des États-Unis, Trump veut revenir sur l’un des effets de la mondialisation en imposant des barrières protectionnistes. Un revirement à 180 degrés après des décennies de négociation ayant pour objet de les rabaisser dans la cadre de l’OMC. Dans un premier temps, une plainte européenne a été adressée à l’OMC en raison des décisions unilatérales américaines, mais avec quel effet ? La crainte est, qu’emporté par son élan, décidé à obtenir des résultats qu’il a promis, le président américain en vienne à s’abstraire de toute réglementation et de son cadre… D’où la position européenne de négociation sur de nouvelles baisses des tarifs douaniers qui voudrait le prévenir.

Les autorités allemandes sont également habitées par la crainte d’une escalade qui pourrait aboutir à la taxation des exportations des véhicules à moteur, leur industrie n’ayant pas besoin de cela après les scandales à répétition de la tricherie sur les rejets du diesel et leurs conséquences. Les surplus du commerce extérieur allemand résultent d’avantage du commerce avec la Chine qu’avec les États-Unis, mais ils pourraient en sortir sérieusement affectés.

De tous côtés, que ce soit avec la Chine, l’Union européenne ou la Russie, les grandes manœuvres de la guerre commerciale viennent à peine de commencer. Les échéances de la mise en application des premières mesures annoncées se rapprochent dangereusement. Quoi qu’il en soit, les tensions ne sont pas prêtes de disparaitre. Commencée comme une Blitzkrieg, la guerre commerciale va prendre l’allure d’une guerre de tranchée au cours de laquelle les offensives vont se succéder.

Comment peut-elle se poursuivre en Chine ? Dans un premier temps, les deux pays vont imposer des taxes sur les secteurs les plus sensibles, le soja et les produits agricoles d’un côté, les produits de haute technologie de l’autre, mais sans s’engager dans une guerre à outrance. Ne débordant pas sur le terrain obligataire. L’environnement des entreprises américaines opérant en Chine va être rendue plus difficile, ainsi que les achats chinois des entreprises américaines. Et le conflit va s’installer, car il n’y aura pas de raison qu’il en soit autrement.

Nous sommes entrés dans une nouvelle ère des relations commerciales, ce qui conduit le FMI à s’inquiéter de ses répercussions sur une croissance salvatrice dont la mondialisation était le fer de lance. Dans un tel contexte, tous les autres problèmes vont être plus difficiles à régler, dont celui de l’endettement dont le poids s’accroit. Tôt ou tard, il va bien falloir y venir après tant de déni. Plus ce sera tardif, plus ce sera douloureux pour le haut du panier des rentiers, à moins qu’ils ne se préservent autant que possible en faisant d’abord payer les petits. Ce serait bien dans leurs pratiques mais cela ne suffira pas.

PS : Chaque jour amène ses révélations sur le compromis que pourraient adopter Angela Merkel et Emmanuel Macron. Avec son voyage à Berlin, les rumeurs et les fuites n’ont pas manqué. Mais cela vaut-il la peine d’en rendre compte dans le détail ? Les deux compères cherchent à habiller leur désaccord au mieux, chacun dans son contexte. Le sommet de juin, c’est désormais acquis, ne donnera pas le signal de la relance de l’Europe.

5 réponses sur “Comment va le monde aujourd’hui ?”

  1. Je ne partage pas votre, entre guillemets, optimisme. Loin d’une guerre de tranchée, je vois plutôt les évènements s’accélérer. La guerre n’est désormais plus uniquement commerciale ; les États-Unis et le Royaume-uni semblent prêts à faire monter les enchères autant qu’il le faudra pour empêcher tout rapprochement entre l’Allemagne et la Russie.
    Il n’y aura pas d’abandon des sanctions Trumpiennes sans abandon de Nord Stream 2. Ce que Merkel ne peut ni permettre (approvisionnement énergétique impératif) ni empêcher (faiblesse politique intérieure)…
    Nous vivons une époque intéressante.

    1. Pour mieux en juger, il est préférable de ne pas s’en tenir aux déclarations mais aux passages à l’acte. Quoiqu’il en soit, cela n’exclut pas des offensives entre les pauses !

  2. Rien de bien neuf ,les USA imposent leurs lois,leurs choix ,leurs initiatives militaires ou autres et les Sarkozy ,Hollande et Macron suivent ,tout en faisant parfois semblant de précéder pour tenter de ne pas paraître ce qu’ils sont en réalité c’est à dire des gouvernants en totale servitude….

  3. Comme dans toute guerre de position, l’étude du front est bien moins révélatrice pour un pronostic de l’issue du conflit que celle des reforts massés derrière chaque ligne. De ce point de vue et au regard de la taille de son marché intérieur (sans se risquer à imaginer une zone de libre échange Chine/Inde qui là pulvérise tout le reste de la planète) la Chine dispose de capacités à tenir la position bien supérieure aux US. Quid des relations commerciales Chine Inde?? J’avoue mon incurie sur le sujet. Mais ça laisse rêveur : un marché « intérieur » de 2,5 Milliards d’habitants et un voisin Russe disposant de ressources énergétiques à la hauteur, si tous ces gens se mettent d’accord, les US ne se retrouveront ils pas relégués à être un gnome armé d’un lance roquette trop lourd pour ses maigres bras… Quand à nous, un destin du no mans land coincé entre deux tranchées ne nous pend il pas au nez?

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